24 millions de m3 d’eau manquent l’été en Provence-Alpes-Côte d’Azur

Communiqué du 02 juin 2017

A l’occasion de sa journée d’information sur le partage de l’eau et les plans de gestion de la ressource en eau, l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse a réuni 170 participants (collectivités, agriculteurs et industriels) pour faire le point sur les enjeux de l’eau en PACA, sur les économies d’eau à réaliser dans un contexte de changement climatique, sur les réussites en matière de partage de la ressource et les financements possibles.

Car il est urgent d’agir : les situations de crise vont se multiplier avec le dérèglement climatique. Seule une gestion durable de l’eau pourra éviter de pénaliser le développement économique sur les territoires et la dégradation des rivières et des nappes.

3,4 milliards de m3 d’eau prélevés par an

En PACA, les hommes ont depuis longtemps anticipé les besoins en eau et la région a été aménagée pour résister au manque d’eau naturel en pays méditerranéen. De grands transferts d’eau (par exemple le canal de Provence ou canal de Marseille) depuis la Durance et le Verdon ont permis d’apporter l’eau « abondante » des Alpes vers le littoral. Ces grands aménagements hydrauliques sécurisent l’approvisionnement en eau notamment dans les Bouches-du-Rhône et le Var. Cependant, la ressource en eau n’est pas illimitée (en ce moment même, des affluents du Verdon sont déjà en tension) et 19 bassins versants et nappes souterraines sont en déficit chronique par rapport aux prélèvements. Le manque d’eau l’été est d’environ 24 millions de m3 pour satisfaire tous les usages et laisser un débit suffisant dans les rivières pour la vie biologique.
En 2016, tous les départements de PACA ont pris des arrêtés sécheresse et la pénurie a perturbé l’activité agricole et économique, les usages domestiques de l’eau et dégradé la qualité des rivières et des nappes. Si on ne fait rien, les tensions sur la ressource vont se multiplier. En effet, une étude pilotée par IRSTEA sur l’impact du changement climatique sur le bassin versant de la Durance d’ici 2050 prévoit que dans le cas d’un scénario de doublement de la concentration atmosphérique en CO2, la diminution du stock de neige dans les Alpes ferait chuter de moitié les débits des cours d’eau en été. Et l’INSEE annonce une augmentation de la population de 500 à 600 000 habitants d’ici 2030, donc une pression encore accrue sur la ressource en eau.

Partager l’eau pour éviter les crises

Chaque usager doit participer à l’effort en portant des projets d’économie d’eau. C’est pourquoi l’agence de l’eau soutient la réalisation des Plans de Gestion de la Ressource en Eau (PGRE) en priorité là où il y a des tensions entre la ressource disponible et les besoins des hommes et des milieux naturels. Ils sont nécessaires pour trouver, en concertation avec les usagers, les bonnes solutions pour en finir avec les crises sécheresse. En ville, réparer les fuites des réseaux d’eau potable et limiter la consommation d’eau permettraient une économie annuelle d’au moins 50 millions de m3 (sur 740 Mm3/an prélevés pour la fourniture d’eau potable).
Dans les champs, la modernisation des canaux agricoles et le passage à l’irrigation par aspersion ou au goutte à goutte (qui peut consommer jusqu’à 4 fois moins d’eau que l’irrigation gravitaire) pourrait permettre une économie de quelques centaines de millions de m3.
Le changement de techniques culturales et de process industriels pour recycler l’eau permet également des économies d’eau. Tout est question de partage pour maintenir l’équilibre entre les besoins de la rivière et ceux des usagers.

Le Calavon : les solutions du PGRE pour s’adapter à la pénurie

Niché entre les monts du Vaucluse et la chaîne du Lubéron, le Calavon connaît des assecs en été et des conflits d’usages. Pour sauver la rivière, 20% des prélèvements doivent être réduits sur la partie amont du Calavon. Le prélèvement d’eau potable d’Apt est déjà reporté dans la nappe profonde en période estivale. Signé en 2015, le schéma d’aménagement et de gestion des eaux intègre le plan de gestion de la ressource. Outre le transfert du captage d’Apt, les usagers de l’eau se sont engagés à économiser l’eau en réparant les fuites dans les réseaux d’eau potable, à maîtriser les consommations ainsi qu’à créer des réserves d’eau à usage agricole.
En PACA, d’autres PGRE sont en cours comme sur le Buëch, dans les Hautes-Alpes, où l’objectif est de réduire de 30 à 50% les prélèvements en passant à l’irrigation par aspersion ou en stockant l’eau l’hiver pour la relâcher en été. Dans les Alpes-Maritimes, le Syndicat mixte pour les inondations l'aménagement et la gestion de l'eau maralpin (SMIAGE), qui porte les PGRE du Loup et de la Cagne, espère économiser 1,3 et 1,4 millions de m3 d’eau prélevés en rivière pendant la période de sécheresse pour maintenir la vie aquatique.

Sur les autres territoires bien approvisionnés par des transferts d’eau, l’agence de l’eau encourage aussi fortement les économies d’eau

Ainsi, par exemple, elle a signé en 2015 avec la métropole Aix Marseille Provence un contrat pour la protection et les économies de la ressource en eau du canal de Marseille (CONPERE). Ce canal achemine les eaux du bassin de la Durance jusqu’à Marseille et aux communes les plus éloignées de la Ciotat et de Saint Cyr sur mer, ce qui représente au global 1,2 million d’habitants soit environ 60 % de la population du département des Bouches du Rhône. Il dessert également des industriels sur le pourtour de l’étang de Berre et satisfait à des besoins agricoles localisés. Le contrat d’environ 56 millions d’euros de travaux (dont 14 apporté par l’agence de l’eau) vise des économies d’eau d’environ 16 millions de m3 par an.

L’agence de l’eau finance les projets jusqu’à 80 %

Les plans de gestion de la ressource facilitent l’accès à certaines aides de l’agence de l’eau. Pour Laurent Roy, directeur général de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, « la cohérence des PGRE se construit sur le terrain : ils s’appuient sur un diagnostic, pour engager une démarche collective et programmer des mesures adaptées à la fois aux acteurs et au territoire. C’est pourquoi, aujourd’hui, les PGRE deviennent le passage obligé pour déclencher des aides de l’agence pour les projets de substitution de la ressource en eau».
Les aides peuvent monter jusqu’à 80 % du montant des dépenses, pour les projets les plus divers : études ou travaux, réfection de réseaux d’eau potable, ou de canaux, passage de l’irrigation à l’aspersion ou à l’arrosage au goutte-à-goutte, changement de process industriel, construction de retenue collinaire, substitution d’un captage par un autre…