Aménager les villes autrement en intégrant l’eau et la nature, une réponse à l’urgence climatique !

Actualité du 28 juin 2022

A l’occasion de son colloque sur la « Ville nature » organisé le 27 juin à Grenoble, l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse a réuni collectivités, urbanistes, paysagistes, sociologues… tous mobilisés en faveur d’un nouvel aménagement des espaces urbains qui réintègrent l’eau, les rivières, la nature et le vivant.

Les vagues de chaleur précoces et la sécheresse installée en France illustrent une nouvelle fois la place centrale de l’eau dans les territoires et en particulier en ville. C’est là que vivent aujourd’hui les deux-tiers de la population française. La température y est en moyenne de 4 °C plus élevée que dans les zones rurales environnantes. Et jusqu’à 12°C la nuit en période de fortes chaleurs. Conséquence d’une urbanisation croissante et de l’étalement urbain qui ont contribué à faire disparaître l’eau, les rivières, la biodiversité, au profit du minéral. C’est autant de surfaces qui ne laissent plus l’eau s’infiltrer, autant de revêtements qui stockent la chaleur et rendent les espaces urbains caniculaires l’été.

Il est urgent d’aménager nos villes autrement, autour de la nature au lieu de vouloir la chasser, au bénéfice d’une eau bien visible, qui s’infiltre et recharge les nappes, avec des cours d’eau renaturés conçus comme autant de solutions pour réduire les risques d’inondations, auto-épurer les eaux, redonner place à la biodiversité et améliorer le bien-être des habitants.

L’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse finance la renaturation des espaces urbains et elle augmente encore de 22 M€ ses aides à des projets favorisant la résilience des territoires face au changement climatique. Elle participe également aux travaux de mise en place du fonds de 500 millions d’euros annoncé par le Gouvernement pour renaturer les villes et adapter plus rapidement la France aux conséquences du changement climatique.

Ces villes pionnières qui coexistent avec la nature

Inclure la nature dans la ville commence peu à peu à faire consensus. Mais l’urgence climatique invite à pousser encore davantage la réflexion en pensant la ville dans la nature. Des collectivités pionnières adaptent leur stratégie d’urbanisation et font ce choix de coexister avec la nature, accompagnées techniquement et financièrement par l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse.

Dans les Alpes-Maritimes, la ville de Mandelieu la Napoule a connu une très forte urbanisation des années 50 jusqu’aux années 90, avec de nombreux impacts sur l’artificialisation des sols, les inondations, incendies ou submersions. Traversée par deux cours d’eau impétueux et reconnue « Territoire engagé pour la Nature » l’an dernier, la commune entend préserver le cadre de vie et réduire les risques d’inondation. Son maire, Sébastien Leroy, souhaite "réorganiser la cité et réécrire tous nos principes d’urbanisation".
Pour cela, la commune a acquis 14 hectares en cœur de ville qui vont être transformés en zone d’expansion de crue pour protéger les habitants de l’aggravation des inondations. Elle mobilise près de 100 millions d’euros sur la période 2020-2026 pour la mise en œuvre de son programme baptisé « la canopée urbaine » : élargissement du Riou, construction d’un ouvrage de ralentissement des crues et renaturation des berges afin de sauvegarder la biodiversité. Accompagnée par l’agence de l’eau, la Ville a déjà engagé 25 millions d’euros en achat foncier.

Capitale française de la biodiversité en 2018, la ville de Besançon se caractérise par une forte minéralité de son centre-ville. Jusqu’en 2026, la ville va investir 6 millions d’euros pour désimperméabiliser les espaces publics grâce au retrait des enrobés des allées des parcs ou des cours d’école et à leur remplacement par des matériaux drainants. La biodiversité et la fonctionnalité des sols sont désormais prises en compte dans tous les nouveaux projets d’urbanisme et d’aménagement. Des dispositifs de collecte et stockage des eaux pluviales permettant de redistribuer celles-ci en période de sécheresse sont également installés chaque fois que nécessaire. "Nous faisons beaucoup de pédagogie pour expliquer notre politique aux habitants, par exemple sur notre gestion différenciée des espaces verts urbains, nombreux à Besançon et fondamentaux pour le vivant en ville", explique Fabienne Brauchli, élue chargée de la transition écologique à la Ville de Besançon.

A Grenoble, couronnée Capitale verte européenne 2022, même ambition pour une ville résiliente face au changement climatique. "Notre promesse est de remettre l’eau dans la ville, indique Anne-Sophie Olmos, vice-présidente de Grenoble Alpes Métropole. Pour des questions de santé, de moral des habitants, de cadre de vie, de qualité de l’air, de refuge pour la biodiversité urbaine, de lutte contre les pollutions, les inondations et la chaleur… nous n’avons plus le choix !" 

Un contrat d’agglomération mobilise ainsi 55,6 millions d’euros sur la période 2020-2023, dont 15,4 millions apportés par l’agence de l’eau.

L’agence de l’eau se mobilise pour accompagner les territoires urbains

Au cours de son 11ème programme d’intervention 2019-2024 (2,6 milliards d’euros), l’agence de l’eau accompagne les territoires urbains pour optimiser la gestion des eaux pluviales, préserver la biodiversité et renaturer les rivières. Elle a pour objectif de consacrer au moins 40 % de ses aides à l’adaptation au changement climatique, 247 M€ à la gestion des eaux pluviales et 461 M€ à la restauration des milieux aquatiques.
En 2020 et 2021, elle a lancé 2 appels à projets de 1,8 million d’euros au total auprès de collectivités qui expérimentent la participation citoyenne dans le cadre de chantiers pour l’eau et les milieux aquatiques. Et la plupart des actions retenues ciblent le milieu urbain.
Dernier coup de pouce pour la nature, le Gouvernement vient d’accorder aux 6 agences de l’eau une autorisation de 100 millions d’euros de dépenses supplémentaires afin d’accompagner la résilience des territoires au changement climatique. Pour l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, l’augmentation de ce plafond de dépenses est de 22 M€ pour 2022 notamment pour la désimperméabilisation des sols, qu’elle peut financer jusqu’à 50 % pour des travaux de déconnexion des eaux pluviales des réseaux d’assainissement et les ouvrages spécifiques d’infiltration (jardins de pluie, pavés et tranchées drainants, bassins...).

"Les pratiques qui consistent à collecter toute l’eau dans des tuyaux d’assainissement unitaires génèrent d’importants problèmes de pollution des milieux, assure Laurent Roy, directeur général de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse. En ville, la gestion des eaux pluviales est un sujet majeur ! Sans parler de la nécessité de recharger les nappes et de créer des espaces favorables à la biodiversité, qui justifient de créer des noues et autres zones d’infiltration. Mais nous ne réussirons pas sans une prise de conscience des habitants eux-mêmes. Car pour que les politiques publiques soient efficaces, il convient qu’elles soient comprises, portées par les populations, actrices d’un nouveau modèle urbain et enclines à considérer l’eau, sa qualité, sa rareté, ses usages, son écoulement, comme des parties intégrantes de leur quotidien".